Daignez permettre, monseigneur,
Que l’épreuve sans elle soit commencée :
L’émotion redouble au moment du bonheur.
Volontiers !
Ah ! sans doute,
À pareil jour nos cœurs battaient aussi !
Ah ! te voici,
Instant que je redoute.
Ô toi qui dans ma main pèses plus d’un quintal,
Plomb enchanté ne me sois pas fatal !
Jeune chasseur, sois prêt !
Tiens ! cet oiseau !… qu’il tombe !
Cette colombe blanche ?
Oh ! soutiens-moi, mon Dieu !
Allons, courage !
Feu !!!
Arrête… c’est moi !… la colombe !!!
(L’oiseau s’envole et gagne l’arbre où est monté Gaspard, qui en descend avec précipitation. — Max, le fusil tendu, suit l’oiseau en visant. Le coup part, la colombe s’envole. — Agathe et Gaspard crient et tombent. On accourt, on prend Agathe, on l’emporte.)
Le chœur, se tenant divisé par groupes et paraissant inquiet
en contemplant Agathe et Gaspard.)
Ô terreur !
Il l’a frappée au cœur !
Qu’a donc Gaspard le chasseur ?
De regarder nous avons peur !
Destin perfide,
Horreur !
Le regard de larmes humide
Est glacé par la stupeur ;
Sur ce front déjà livide
C’est la mort et sa pâleur.
(On apporte Agathe sur le devant du théâtre et on la pose sur un banc.)
Où suis-je ?
Pourquoi souffrir ainsi ?
Reviens à toi !
Sauvée ! ô Dieu, soyez béni !
Ah ! quel heureux prodige.
Vient nous la rendre ici !
Ô ciel clément, merci !
Ah ! c’est la mort, oui… je la vois !
Le ciel l’emporte, hélas ! c’est fait de moi,
J’existe encor ; l’effroi m’avait troublée,
Au jour enfin j’ouvre les yeux,
De ma douleur me voilà consolée
Et je respire l’air des cieux.
Elle renaît.
Elle est sauvée.
Ô Max, je te revois !
J’entends encor sa voix.
Ô ciel clément, merci !
(Samiel parait près de Gaspard qui le voit seul.)
Et quoi ! déjà Samiel ici !
Ta main de fer me brise,
Fils de l’enfer, ma haine te méprise.
Maudit ! maudit le ciel !!!
Quoi ! sa prière est le blasphème !…
C’est bien la mort d’un scélérat !
Le ciel voulut qu’il expirât
Pour que l’enfer s’en emparât
Chargé du poids de l’anathème
Toujours ce fut un scélérat !
Et Dieu voulut qu’il expirât
Pour que l’enfer s’en emparât
Chargé du poids de l’anathème.
C’est bien la mort d’un scélérat.
Ah ! que l’abîme l’engloutisse !
Et toi, du sombre maléfice
Raconte-nous l’affreux secret ;
Malheur à qui me tromperait !
Oui, je mérite ma disgrâce !
Par ce damné je fus séduit ;
De la vertu quittant la trace,
Le désespoir m’avait conduit.
Ces balles,
Franchissant les airs,
Par des cabales,
Sont l’œuvre des enfers.
Hors de ces lieux porte ton crime
N’espère plus un chaste hymen.
Du ciel vengeur sois la victime !
Non, non, pour toi jamais sa main