Ciel clément, je te rends grâce,
Ta bonté comble mes vœux.
Ô transport, délire extrême !
Tout mon être vole à toi.
Pour mon cœur quel doux émoi !
Près de celui que j’aime
L’espoir a banni l’effroi.
Ah ! quel bonheur suprême !
C’est le ciel ouvert pour moi !
Scène III
ANNETTE, en déshabillé de nuit.
Te voilà donc enfin ?
Ô mon Agathe !
qui sont au chapeau de Max ; à part.
Ces plumes… qu’est-cela ? j’avais cru voir des fleurs !…
Tu m’attendis bien tard ?
Reste avec nous, je crains qu’un orage n’éclate.
Ah ! mon cousin ! qu’as-tu fait ?
Maladroit !
Tu parais mécontent ?
Mécontent ? au contraire.
As-tu gagné ?
Sans doute.
Est-il vrai ?
Sans être téméraire,
D’espérer beaucoup pour demain !
Mon bonheur était dans ta main.
Tu fus heureux enfin !
Certes ! mais non pas à la cible ?
Vois ce que mon bras invincible
Hors de portée en l’air, frappa d’un plomb certain !
(À Agathe.)
Mais qu’as-tu donc ? du sang ?…
Ce portrait ma blessée.
Quel accueil pour ta fiancée !
Oh ! dis-moi, ce portrait…
Était mal suspendu.
Aussi pourquoi donc à sept heures
Te mettre à ton balcon ?
À sept heures, dis-tu ?
Elle guette toujours, lorsqu’au loin tu demeures.
C’est l’heure où cet oiseau par moi fut abattu.
Tu parles seul, tu parais triste ?
Te plaindrais-tu de moi ?
Un gage de succès, il offense tes yeux !…
Est-ce en cela qu’un tendre amour consiste ?
Ah ! ne sois pas injuste, ami… Ces grands oiseaux
Sont d’un fatal présage.
Ils sont nobles et beaux.
Pourquoi rêver ainsi ? Sais-tu combien je t’aime ?
Ô Max ! sans toi le plus beau sort
Pour mon fidèle cœur ne vaudrait pas la mort
Il faut partir à l’instant même.
Eh quoi ?
Je fus heureux une seconde fois.
Vraiment ?
Le plus beau des exploits
Un vieux cerf seize cors !
Se peut-il ?
Les paysans au fond des bois
Cette nuit pourraient bien se rendre.
Je ne veux pas manquer le prix d’un si beau coup.
Où donc l’as-tu laissé ?
Dans la Gorge du Loup.
Dans la Gorge du Loup !…
Non ! non ! de grâce !
Toi dans ce lieu d’horreur ?
Le chasseur noir souvent y passe,
Et qui l’entend fuit de terreur.