Page:Pêcheurs de Terre-Neuve, récit d'un ancien pêcheur, 1896.djvu/9

Cette page a été validée par deux contributeurs.

PÊCHEURS DE TERRE-NEUVE


I

DÉPART ET TRAVERSÉE


Les conditions actuelles de la pêche de la morue sont un peu différentes de celles du temps où j’étais moi-même un Terre-Neuvien, mais le fond du métier est resté le même et, — pour remonter à près de vingt ans en arrière, — mes impressions ont encore gardé une vivacité qui me permettra peut-être de les rendre sensibles à l’imagination de quelques-uns.

Pendant deux ans, j’ai fait cette pêche, mais je ne vous raconterai que ma première campagne. Je m’embarquai à Granville, dans les premiers jours de mars 1876. Disons tout de suite que rien ne m’y obligeait, excepté mon imagination qui me faisait voir plus belle la profession de marin et même de pêcheur de morue que celle de laboureur dans laquelle toutes sortes de bonnes raisons m’engageaient à rester. D’ailleurs, il ne s’était pas écoulé douze heures que ma fièvre maritime était apaisée.

Déjà avant l’embarquement, à la revue qui le précède d’une quinzaine de jours, j’avais eu comme une vision