une effrayante avidité. Lorsqu’il fut enfin rassasié, il se prit à moraliser, et se répandit en invectives contre ces hommes qui dédaignent tout ce qui est d’un usage commun et vulgaire, et n’estiment que ce qui est rare.
Par une dépravation vraiment déplorable, dit-il, on méprise les jouissances faciles, et on se passionne avec entêtement pour celles qui nous semblent interdites :
Je ne veux point d’une facile gloire :
L’obstacle ajoute un lustre à la victoire.
Aux bords du Phase habite le faisan :
Voilà son prix. La poule numidique
A vu le jour dans les sables d’Afrique :
Pour un gourmet, c’est un morceau friand.
Pauvre canard, ta chair est fine et molle ;
Fidèle oison, des fureurs du Gaulois
Ton cri jadis sauva le Capitole ;
Mais humblement vous croissez sous nos toits :
Vous n’êtes bons qu’à nourrir des bourgeois.
Du bout du monde, où le sort l’a fait naître[1],
La sargue accourt ; on l’achète à grands frais ;
Et le barbeau, de la table du maître,
Ne fait qu’un saut à celle des valets.
La rareté fait le prix de la chose :
Le cinnamome, enfant d’un sol lointain,
Fait oublier les parfums d’une rose[3] ;
Et pour l’amour on néglige l’hymen[2].