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tion avec Vénus ma bru, que j’aime comme ma fille, le puis-je vraiment avec convenance ? Et puis il y a des lois qui défendent de recueillir les esclaves fugitifs, et je n’irai pas y porter atteinte.

Découragée de ce nouvel échec, et renonçant à suivre un mari qui a des ailes, Psyché se livre à de cruelles réflexions. Où chercher du secours, quand des déesses même ne me témoignent qu’une bonne volonté stérile ? Où porter mes pas, quand tant de pièges m’environnent ? Quel toit, quelle retraite assez obscure pour me cacher à l’œil inévitable de la toute-puissante Vénus ? Allons, Psyché, une résolution énergique ! plus d’illusions frivoles. Va, de toi-même, te remettre aux mains de ta souveraine : ta soumission, pour être tardive, peut encore la désarmer. Qui sait ? peut-être celui que tu cherches va-t-il se retrouver dans le palais de sa mère. Ainsi décidée à cette soumission hasardeuse, dût-elle y trouver sa perte, Psyché déjà préparait son exorde.

Cependant Vénus, qui a épuisé tous les moyens d’investigation sur terre, en va demander au ciel. Elle ordonne qu’on attelle son char d’or, œuvre merveilleuse de l’art de Vulcain, qui lui en avait fait hommage comme présent de noces. La riche matière a diminué sous l’action de la lime ; mais, en perdant de son poids, elle a doublé de prix. De l’escadron ailé qui roucoule près de la chambre de la déesse, se détachent quatre blanches colombes ; elles s’avancent en se rengorgeant, et viennent d’un air joyeux passer d’elles-mêmes leur cou chatoyant dans un joug brillant de pierreries. Leur maîtresse monte ; elles prennent gaiement leur vol ; une nuée de passereaux folâtres gazouillent autour du char. D’autres chantres des airs, au gosier suave, annoncent, par leurs doux accents, l’arrivée de la déesse. Les nuées lui font place ; le ciel ouvre ses portes à sa fille chérie, et l’Empyrée tressaille d’allégresse à sa venue. L’harmonieux cortège défile, sans avoir à craindre la rencontre de l’aigle, ni du vorace épervier.

Vénus va droit à la royale demeure de Jupiter, et la fière solliciteuse demande hardiment qu’il lui prête le ministère de Mercure ; car il lui faut la meilleure poitrine de l’Olympe. Signe d’assentiment des noirs sourcils. Vénus revient triomphante, et, tout en descendant des cieux avec Mercure, lui dit d’un ton animé : Mon frère l’Arcadien, vous savez que votre sœur Vénus ne fait jamais rien sans vous ; vous n’ignorez pas non plus que je suis en quête d’une esclave à moi qui se cache, et que je perds mon temps à la chercher. Je n’ai plus qu’une ressource, c’est de faire proclamer que je promets récompense à qui la trouvera. Je compte sur vous pour me rendre, sans tarder, ce bon office. Surtout que son signalement soit clair et précis. S’il y a lieu plus tard de poursuivre quelque receleur en justice, qu’on ne puisse prétexter cause d’ignorance. Là-dessus, elle remet par écrit à Mercure le nom de Psyché avec les indications nécessaires, et regagne son palais.

Mercure, empressé de s’acquitter de la commission, se met à parcourir la terre, proclamant partout ce qui suit : « On fait savoir qu’une fille de roi, du nom de Psyché, esclave de Vénus, a pris la fuite. Quiconque pourra la livrer, ou in-