Page:Pétrarque - Mon secret, 1898.pdf/9

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
Introduction



Sous le titre de Mon Secret, Pétrarque a fait dans un cadre plus restreint, mais avec non moins de sincérité et d’éloquence, ce qu’ont fait saint Augustin et J.-J. Rousseau ans leurs Confessions. Il s’est raconté lui-même à la postérité. Mais, chose singulière ! tandis que les Confessions de saint Augustin et de Rousseau sont dans toutes les mémoires, on semble en quelque sorte se faire scrupule de violer le Secret de Pétrarque. C’est bien à tort. On se prive ainsi de gaieté de cœur du moyen le plus simple et le plus sûr de le connaître, car on le suit dans ces pages, à travers les méandres multiples de sa nature si complexe, sans risque de se fourvoyer. « Il est a douze cents lieues de nous, et son livre imprime en nous son image comme la lumière réfléchie va peindre au bout de l’horizon l’objet d’où elle est partie[1]. »

Ce fut en 1336, lors de l’ascension qu’il fit, en compagnie de son frère, sur le mont Ventoux, que l’idée de ce livre germa dans son esprit. La montée était longue et pénible. Il dut s’arrêter plus d’une fois. Dans une de ces haltes, le vaste silence de la

  1. Taine, Essais de critique et d’histoire..