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l’antiquité, te souci de la forme le préoccupait avant tout et il ne se lassait pas de remanier ses écrits. À la monotonie fastidieuse que la scolastique du moyen âge avait imposée au latin, il substitua, avec l’accent personnel, la couleur et la vie. Secouant le joug des influences extérieures, il s’éleva au-dessus d’elles de toute la hauteur de son originalité. Ajoutez à cela un sens critique si sûr qu’aujourd’hui encore la plupart de ses jugements font autorité. « C’est ainsi qu’il inaugura chez les Latins le sentiment délicat de la culture antique, source de toute notre civilisation, et qu’il mérite d’être appelé le premier homme moderne[1]. » Par le latin, langue universelle, il agissait sur toute la partie pensante de son temps. Après lui, la route se trouva frayée ; les grands humanistes de la Renaissance n’eurent qu’à la suivre.

Poésie, philosophie, histoire, éloquence, polémique, style épistolaire, il cultiva presque tous les genres. On remarque dans ses Épîtres, une grande variété de tons et le sentiment développé du pittoresque. Dans ses Églogues et ses Lettres sans titre, il flétrit avec une verve mordante les scandales de la cour papale d’Avignon. Il entreprit de célébrer dans une épopée la conquête de l’Afrique par Scipion. Il fondait sur ce poème tout l’édifice de sa renommée. Ses contemporains en saluaient d’avance l’apparition et se promettaient une seconde Énéide. La postérité en a jugé autrement ; mais si l’Afrique ne place pas son auteur à côté de Virgile, elle le met bien au-dessus de Stace et de Silius Italicus.

L’histoire, mais surtout l’histoire romaine,

  1. E. Renan, Averroès, III, 3.