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trie. » Tu sais ce qu’il te suggère ; il t’indiquera les routes et les écueils ; il te dira ce que tu dois suivre et ce que tu dois éviter. Obéis-lui si tu veux être sauvé et libre. Il n’est pas besoin de longues délibérations, la nature du danger exige de l’action. L’ennemi te serre par derrière et t’attaque en face ; les murs dans lesquels tu es assiégé tremblent ; il n’y a plus à hésiter. À quoi sort de chanter agréablement pour les autres si tu ne t’écoutes pas toi-même ? Je termine : fuis les écueils, retire-toi en lieu sûr, suis les inspirations de ton âme, qui, quoique basses pour le reste, sont très nobles quand il s’agit de la vertu.

Pétrarque. Plût à Dieu que vous m’eussiez dit cela dès le principe, avant de me livrer à ces études !

S. Augustin. Je te l’ai dit bien souvent, et dès le moment où je t’ai vu prendre la plume, je t’ai prévenu que la vie était courte et incertaine, que le labeur était long et certain, que l’œuvre serait considérable et que le fruit en serait mince ; mais tes oreilles étaient bouchées par les applaudissements du public, qu’à ma grande surprise, tu as suivis tout en les maudissant. Mais, comme nous nous sommes entretenus assez longtemps, je t’en prie, si quelques-uns de mes conseils t’ont été agréables, ne les laisse point languir dans l’indifférence et l’oubli ; si d’autres t’ont paru un peu rudes, n’en sois point choqué.

Pétrarque. J’ai de grandes actions de grâces à vous rendre pour une foule de