Page:Pétrarque - Mon secret, 1898.pdf/114

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

roi assis en haut, que signifient-ils, sinon le sommet de la tête et la raison qui y réside ? Voici ce que dit Virgile : C’est là, dans un antre profond, que le roi Éole dompte les vents aux prises et les tempêtes bruyantes, qu’il enchaîne et emprisonne. Ses sujets, indignés, frémissent autour de leur barrière, en faisant retentir la montagne d’un horrible fracas. Éole est assis au sommet, le sceptre en main[1]. Ainsi parle le poète. En examinant chaque mot, j’ai entendu l’indignation, j’ai entendu la lutte, j’ai entendu les tempêtes bruyantes ; j’ai entendu le frémissement et le fracas : tout cela peut se rapporter à la colère. Par contre, j’ai entendu le roi assis au sommet, le sceptre en main, domptant, enchaînant et emprisonnant : qui doute que cela puisse également se rapporter à la raison ? Néanmoins, pour qu’il fût évident que tout cela avait trait à l’âme et à la colère qui la trouble, voyez ce qu’il ajoute : Il modère leur fougue et calme leur colère[2].

S. Augustin. Je loue le sens caché de cette narration poétique, qui, je le vois, t’est très familier ; car, soit que Virgile ait eu cette intention on écrivant, soit que, très éloigné d’une pareille pensée, il ait voulu dépeindre dans ces vers une tempête sur mer, et pas autre chose, ce que tu as dit des accès de la colère et de l’empire de la raison me parait dit avec assez d’esprit et de justesse.

  1. Énéide, I, 52-57.
  2. Énéide, I, 57.