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premier endurcissement, ne pourrais-tu pas alors, quoique ayant non pas la certitude mais du moins l’espérance, mourir à quarante ans et renoncer sans regret à ce restant de vie qui décline vers la vieillesse ? »

Ces pensées, mon père, et d’autres semblables, me revenaient à l’esprit. Je me réjouissais de mon avancement, je pleurais mon imperfection et je plaignais l’inconstance ordinaire des actions humaines. Je paraissais en quelque sorte avoir oublié en quel lieu et pour quel motif j’étais venu, jusqu’au moment où, laissant de côté ces réflexions auxquelles un autre endroit convenait mieux, je regardai et vis ce que j’étais venu voir. Averti par le soleil qui commençait à baisser et par l’ombre croissante de la montagne que le moment de partir approchait, je me réveillai pour ainsi dire et, tournant le dos, je regardai du côté de l’occident.

On n’aperçoit pas de là la chaîne des Pyrénées, ces limites de la France et de d’Espagne, non qu’il y ait quelque obstacle que je sache, mais uniquement à cause de la faiblesse de la vue humaine. On voyait très bien à droite les montagnes de la province lyonnaise et à gauche la mer de Marseille et celle qui baigne Aigues-