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À l’âge de vingt-deux ans, je revins dans ma patrie. J’appelle ma patrie cet exil d’Avignon, où j’avais été dès la fin de ma première enfance, car l’habitude devient une seconde nature. Là je commençai à être connu, et mon amitié fut recherchée par de grands personnages ; pourquoi ? j’avoue maintenant que je l’ignore et que cela m’étonne ; il est vrai qu’alors cela ne m’étonnait pas, car, selon la coutume de la jeunesse, je me croyais très digne de tous les honneurs. J’ai été recherché principalement par la noble et célèbre famille des Colonna qui fréquentait alors la curie romaine, ou pour mieux dire qui l’illustrait. Introduit dans cette famille, j’y fus traité avec une considération qui ne me serait peut-être pas due maintenant, mais qu’alors je ne méritais certainement pas. Emmené en Gascogne par l’illustre et incomparable Jacopo Colonna, alors évêque de Lombez, dont je n’ai pas vu et ne verrai peut-être pas le pareil, j’ai passé au pied des Pyrénées un été presque céleste, dans la compagnie charmante du maître et de sa suite, de sorte que je soupire toujours en me rappelant ce temps-là. À mon retour, j’ai vécu pendant plusieurs années sous son frère le cardinal Giovanni Colonna, non comme sous un maître, mais