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et ensuite toute ma jeunesse sous mes vanités, non toutefois sans de grandes absences. À cette époque, je séjournai quatre ans entiers à Carpentras, petite ville voisine d’Avignon du côté du levant, et dans ces deux villes j’appris un peu de grammaire, de dialectique et de rhétorique, autant qu’on peut en apprendre à cet âge et qu’on en enseigne ordinairement dans les écoles : vous comprenez, cher lecteur, combien peu j’en appris. De là je me rendis à Montpellier, où je consacrai quatre autres années à l’étude des lois ; puis à Bologne, où pendant trois ans j’entendis expliquer tout le corps du droit civil. On pensait généralement que j’aurais fait de grands progrès dans cette carrière si j’avais continué ; mais je renonçai complètement à cette étude dès que je ne fus plus sous la tutelle de mes parents. Ce n’est pas que les lois me déplaisent, car leur autorité, sans contredit, est grande, et elles sont pleines de l’antiquité romaine, qui fait mes délices, mais c’est que leur usage est dépravé par la méchanceté des hommes. J’ai donc regretté d’apprendre une chose dont je ne voulais pas me servir malhonnêtement, dont je ne pouvais guère me servir honnêtement, et qui, si je l’eusse voulu, aurait fait attribuer mon honnêteté à l’ignorance.