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HARRISSON LE CRÉATEUR

dont la vitesse dépassait rarement cent mètres à la seconde, gardaient leurs partisans parmi les rêveurs, les malades, les personnes sujettes au vertige. On vit même arriver au 1.47 quelques jeunes étudiants à califourchon sur des chevaux ; costumés à l’antique, ils avaient le grand casque miroitant des pompiers barbares, une veste de laine à brandebourgs et de lourdes bottes en cuir naturel ; ils étaient armés d’une carabine à poudre azotée, et un long sabre d’acier brut pendait à leur selle. La foule se pressait sur leur passage et les acclamait ; quelques femmes légères leur jetaient des fleurs artificielles.

Des forces policières importantes avaient été envoyées sur les lieux. On se méfiait, en effet, des agents des transports aériens, dont la récente revendication de la journée d’une heure avait été repoussée. Soutenus par les habitants des parallèles, gens de maison, cinétéléphonistes, météorologistes, vitrificateurs, ouvriers des centrales, les agents des transports avaient contre eux la majorité des agriculteurs, les artisans à domicile, les distributeurs, c’est-à-dire presque toute la population méridienne. Il eût été possible de leur donner satisfaction, mais la réforme eût mécontenté une foule de gens et provoqué, par incidence, d’autres réclamations.

De plus, les agents des transports avaient gâté leur cause par des revendications secondaires maladroites et agaçantes. C’est ainsi qu’ils avaient demandé, avec une arrogance de mauvais aloi, les premières places dans les solennités publiques et qu’ils avaient prétendu exiger des voyageurs des marques extérieures de respect fort humiliantes. Le Conseil suprême, reconnaissant là un détestable orgueil de caste, avait opposé son veto. Et si les