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LA MÊLÉE

Le vingtième jour de la guerre féerique, plusieurs centrales s’éteignirent cependant, par suite de circonstances inconnues. La diminution de l’énergie fut sensible dans les zones secondaires. En même temps, le grand désordre des hommes sembla s’apaiser ; il y eut une étonnante accalmie.

Ce fut l’heure singulière où le destin hésita…

L’organisation cinétéléphonique avait subi de graves dommages et les Nouvelles Générales ne renseignaient plus les foules. Cependant de nombreux appareils privés fonctionnaient encore.

Le vingt-et-unième jour, à dix heures du matin, au méridien d’origine, après quelques instants d’un silence étrange, tous les récepteurs commencèrent à résonner de façon inattendue. Des clameurs désordonnées se croisaient en tous sens. Elles ne tardèrent pas à s’orienter. Et ce fut comme la plainte immense de la terre, puis un appel déchirant, puis une prière pressante, chargée de menaces, qui volait vers l’Europe occidentale, pays des grands laboratoires, et se concentrait enfin sur le Refuge.

— Harrisson ! Harrisson ! Sauve-nous !… Brise les armes aux mains des meurtriers !… Toi seul peux agir ! Tu dois agir ! Vite ! Vite !… C’est toi qui fus le créateur des forces diaboliques ! Romps le cercle affolant de nos douleurs !… Le temps passe ; l’orage va s’amonceler de nouveau sur nos têtes ! Et tu ne réponds pas !… Le sang des morts crie contre toi, porteur de maléfices !… Harrisson ! il n’est pas trop tard, peut-être !… Harrisson ! Harrisson ! sauve les hommes !


Harrisson n’était pas au Refuge. La veille, sur les instances mêmes de Lygie, il avait quitté sa maison pour se rendre au laboratoire 4.48, où