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LA MÊLÉE

le ravitaillement. En outre, il s’agissait là d’une entreprise sans précédent et les physiciens n’osaient affirmer qu’elle n’aurait point une répercussion catastrophique sur l’ensemble du réseau. On hésitait à risquer immédiatement un bouleversement mondial. La majorité des savants proposait une solution moins radicale, moins hasardeuse. Il fallait seulement, disaient-ils, par quelque moyen encore à découvrir, rendre inutilisable, pour les machines de guerre actuellement employées, l’énergie du réseau public.

C’était l’opinion de Lygie. Harrisson, au contraire, dans la crainte d’un mal inconnu gagnant l’humanité entière, avait conseillé la destruction. Devant la résistance de ses confrères, il s’était d’ailleurs incliné. Et, soit au Refuge avec Lygie, soit au laboratoire 4.48 dont il avait pris la direction, il cherchait jour et nuit le moyen d’interdire aux belligérants les réserves énergétiques pratiquement inépuisables du réseau mondial. Car ce difficile problème n’était point résolu.

En cette période d’universelle anxiété, les savants, un moment éclipsés par les grands politiques, retrouvaient leur place au premier plan. Les masses regardaient instinctivement de leur côté ; on attendait de leurs efforts les sauvegardes essentielles. Et, entre tous, Harrisson le créateur, Harrisson continuateur d’Avérine, semblait capable de trouver la solution élégante et audacieuse qui tirerait l’humanité de l’impasse où elle s’était follement engagée. La supériorité de Harrisson était d’ailleurs reconnue de l’élite, et les savants les plus célèbres briguaient l’honneur de l’aider dans ses recherches.

Pendant que l’on travaillait ainsi dans les laboratoires neutres, les savants africains ne restaient