Page:Pérochon - Les Hommes frénétiques, 1925.djvu/144

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
132
LES HOMMES FRÉNÉTIQUES

ment poussé à la guerre, les mêmes hommes qui avaient suivi, avec une abominable curiosité, toutes les phases de la catastrophe, se précipiter vers les champs de bataille, prodiguer une étonnante activité, panser avec un dévouement admirable les plaies dont ils étaient, en quelque manière, responsables. Les services généraux d’hygiène, de médecine, de chirurgie, concentrèrent en quelques heures tous leurs moyens d’action. Spontanément, les organisations autonomes des pays neutres offrirent leurs services et rivalisèrent d’abnégation. Enfin des particuliers accouraient aussi, hommes et femmes de toutes conditions, qui se mettaient modestement aux ordres des autorités compétentes et que nulle besogne ne rebutait.

La tâche la plus difficile consistait en la recherche des blessés. Beaucoup de malheureux, atteints dès les premiers jours de la bataille, avaient fini par succomber, loin de tout secours, torturés par la douleur et par la soif. Sous des décombres fumants, on découvrait des moribonds qui avaient échappé par miracle aux flammes et à l’asphyxie. On en trouvait d’autres à demi enterrés, d’autres qui râlaient sous des monceaux de cadavres. La gangrène faisait de terribles ravages ; des plaies noirâtres, hideuses, grouillaient de vers. La plupart des blessés étaient hébétés.

De rapides ambulances aériennes suivaient les alignements détruits. Sur les grandes voies du réseau général, les express sanitaires se succédaient de minute en minute, emportant leur lamentable chargement vers le paradis des hôpitaux neutres. La nuit n’interrompait point les recherches ; des phares mobiles sillonnaient l’atmosphère et dissipaient les ténèbres autour des équipes sanitaires