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HARRISSON LE CRÉATEUR

habituelle au savant. Dès les premiers moments, il lui fallut déchanter.

Il se heurta d’abord aux manœuvriers du parti méridien. L’organisation du travail scientifique était à leurs yeux une question secondaire que l’on devait réserver, car on ne pouvait, avec cela, exercer sur le public la prise sentimentale nécessaire à la formation des grands courants électoraux.

Harrisson résista et parla en toute sincérité. C’est ainsi que, pris à partie par un candidat des parallèles au sujet de sa déposition dans l’affaire des grévistes, il déclara incidemment qu’il trouvait la condamnation bien sévère, qu’il était partisan de la révision et, enfin, qu’il ne voyait nulle impossibilité à ce que l’on accordât la journée d’une heure aux sous-agents.

Le lendemain, le comité central des méridiens rayait le nom de Harrisson sur la liste de ses candidats. Et, de tous côtés, on accusait le savant de chercher le succès par des procédés de surenchère démagogique.

Libéré, Harrisson mena la campagne tout à fait à sa guise.

À mesure qu’il parlait aux foules, qu’il se heurtait aux contradictions passionnées et absurdes, le danger se précisait à ses yeux : une des heures frénétiques de l’humanité allait sans doute prochainement sonner.

Il entrevoyait des possibilités formidables de meurtre et de destruction ; il songeait à ces éléments nouveaux d’une subtilité inouïe et contre lesquels aucune parade n’était encore prête.

Une immense responsabilité pesait à ses épaules. Lygie soutenait son courage. Ensemble, ils cherchaient, eux aussi, à traduire la vérité en formules