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LES GARDIENNES

mais elle était malhabile aux paroles et, d’ailleurs, son grand trouble augmentait sa timidité. Alors, sans retirer ses mains, elle s’agenouilla et se mit en prière.

La Misangère était d’une famille où, depuis assez longtemps déjà, on ne priait plus. À travers ses larmes, elle regarda Francine avec un peu d’étonnement, puis, quand elle eut compris ce que l’autre faisait, elle avoua tout bas, d’une voix hésitante :

— Je voudrais… entendre tes paroles et les suivre.

Francine reprit lentement et à mi-voix la prière des morts.

Quand la prière fut terminée, elles se redressèrent toütes les deux. La Misangère ne pleurait plus ; son visage était grave et serein. Les dernières paroles que son fils avait prononcées devant elle vinrent à ses lèvres ; elle murmura :

— Quoi qu’il arrive, soyez forts ! soyez forts !

Avant de laisser partir Francine elle lui fit plusieurs recommandations, lui traça son travail, minutieusement ; cela sur un ton qui marquait la distance entre la patronne et sa servante.

Et le lendemain, au point du jour, elle arrivait au Paridier comme à l’habitude, traînant Claude derrière elle.