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LES GARDIENNES

seul ; cela, la Misangère l’admettait. Elle n’avait jamais aimé son gendre, mais elle tenait en estime sa forte énergie.

Elle s’effaça done tout de suite, sans témoigner d’humeur et sans avoir l’air de remarquer les ricanements des valets. Au reste, elle couvrit sa retraite d’une raison excellente : puisque Solange avait son mari auprès d’elle, il fallait consacrer tout le temps de cette permission à aider Léa et à la réconforter.

Hortense mena donc le père Claude à la Cabane et, là comme au Paridier, ils donnèrent leur plus grand effort. L’aide qu’ils apportèrent fut la bienvenue.

On était aux derniers beaux jours et il fallait se hâter de travailler avant les pluies d’automne qui rendent les terres du Marais tout à fait inabordables. Au pré Paradis, une belle coupe de regain était encore sur pied. Le père Claude prit la faux et fit ce qu’il put. Les bras poussaient encore l’outil assez galamment, mais les reins manquaient de souplesse et, le soir, le bonhomme restait cassé en deux. Il connut cependant une joie : son petit-fils ne le lâchait pas plus que son ombre. L’enfant, toujours docile avec sa mère et plus que jamais soucieux de se tenir à bonne distance de la Grande Hortense, témoignait familièrement au vieillard une amitié sincère. Il le conduisait au travail sur son bateau et, après besogne faite, le ramenait par des fossés de traverse où il lui montrait des choses curieuses que le grand-père, homme de plaine, connaissait mal,