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LES GARDIENNES

à présent, semblait endormie. Clovis s’enquérait des rendements, des fumures et la Misangère le renseignait. Au champ des Crépelles qui était proche, ils rencontrèrent Christophe chargeant ses topinambours, Clovis parla au valet d’une voix amicale, puis il fit cette observation qu’avec la seule aide de ce jeune gars, elles n’avaient pas dû venir facilement à bout des semailles.

— Elles sont terminées cependant ! dit Solange.

Et la Misangère :

— Allons à la Tombe-Renaud : nous verrons les emblavures.

Ïls allèrent done à la Tombe-Renaud. C’était une petite éminence où poussaient quelques noyers ; de là, on avait sous sa vue les terres principales du Paridier, en bordure d’un grand carré de plaine qui était le grenier du pays.

En cette saison d’hiver, aux yeux d’un homme de ville, cette terre jaunâtre et presque nue, cette plaine monotone étendue sous un ciel lourd de pluie, eût semblé chose fort triste et sans nulle signification. Mais, aux yeux d’un paysan, le fort et minutieux travail des hommes apparaissait avec évidence et la terre, déjà, donnait sa promesse.

Clovis, debout sous les noyers, son fils entre les bras, regardait les emblavures.

La Misangère, le bras tendu, donnait ses explications. Lui restait immobile et muet. Ses yeux alluient des guérets récemment ensemencés où se voyaient encore les rayures de la herse, aux champs d’avoine précoce couverts de sombres touffes étalées ;