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LES GARDIENNES

Le soir, dans sa chambre, elle se surprit à fredonner une berceuse. Elle s’arrêta soudain, confuse, craignant d’avoir été entendue, à cause du deuil qui pesait sur la maison.


À partir de ce moment, la vie de Francine ne fut qu’une espérance ardente. Rien ne l’effrayait plus ; les chemins d’avenir s’ouvraient, tout baignés d’été.

La nuit, pendant son sommeil, comme de douces fumées voyageuses ses songeries se levaient devant elle. Le jour elle rêvait encore, mais elle se représentait alors sa vie raisonnablement, par images vives et précises.

Chez la vieille dame qui la recevrait comme servante, elle n’aurait pas grand travail ; il lui resterait du temps pour s’occuper de son enfant, de son fils.

Car, ce serait un fils, qu’elle appellerait François : jamais elle ne pensait autrement. Elle le voyait déjà, agile, brun et un peu trop méchant ; il lui attirerait, par ses cris, des démêlés avec la vieille dame, à moins que, par grâce de Dieu, cette dernière ne fût sourde. La nuit, elle le coucherait dans son lit, auprès d’elle, tout contre et ils se réchaufferaient mutuellement.

Et puis, elle le voyait grand… grand et fort, galamment vêtu et, surtout, très fier !

Elle ne resterait pas éternellement en condition. Avec l’argent qu’elle possédait déjà, celui qu’elle ne pouvait manquer d’économiser encore, il lui serait aisé de s’établir.

Quelle loi l’empêcherait, par exemple, de prendre