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LES GARDIENNES

Puis il avait fermé la boutique.

Le lendemain, les deux enfants la rouvraient ; et, depuis, au prix d’un labeur inconcevable auquel rien ne les avait préparés, ils maintenaient la clientèle.

La Misangère aimait à les voir, à les encourager ; au besoin, elle modérait leur ardeur, donnait des conseils de prudence.

Cette fois, elle les trouva en train de charger la voiture pour une tournée de plaine, Marguerite, du fond de la boulangerie, cria :

— Bonsoir, cousine Hortense !

Et le garçon, essoufllé, une dizaine de miches entre les bras, dit à son tour :

— Ça chauffe, ce soir ! nous ne sommes pas en avance !

La Misangère les quitta vite afin de ne pas leur faire perdre de temps.

Elle reprit le chemin du Paridier, bien décidée à exiger des siens un courage au moins égal à celui des autres.

Arrivée à la ferme, elle s’arrêta un peu dans la cour. Des bruits de repas vinrent jusqu’à elle avec des éclats de voix et des rires insolents ; Solange devait être aux prises avec les valets.

La Misangère souleva silencieusement le loquet et entra : aussitôt tous les bruits tombèrent. Les valets étaient assis à la table dans la pénombre ; Solange, près de l’âtre, déshabillait son enfant. Apercevant sa mère, la jeune femme balbutia, gênée :