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LES GARDIENNES

bonhomme allait à la promenade ; à côté de lui, une dame de ville, un peu lourde et âgée, sa femme sans doute, marchait à petits pas.

Francine changea de trottoir, mais l’employé l’avait également reconnue ; quand il la croisa, il sourit et leva son chapeau avec autant de politesse que s’il se fût trouvé devant une personne d’importance. Elle rendit le salut et passa vite… Elle passa vite et puis, aussitôt après, ralentit son allure, se retourna : juste à ce moment la dame regardait en arnière, elle aussi…

Francine continua son chemin, troublée par cette rencontre. La bonté de cet employé lui revenait en mémoire. C’était, à la ville, la seule personne qu’elle connût à présent ; c’était, par le monde, la seule personne capable de s’intéresser à son sort et de lui donner des conseils de raison. Ne lui avait-il pas dit :

— Si, quelque jour, vous avez des ennuis, n’oubliez pas que nous restons à votre disposition.

Eh bien ! elle avait de graves ennuis, elle perdait la tête, ne savait comment s’en tirer…

Comme une personne en danger de se noyer se raccroche à tout ce qui passe à portée de sa main, Francine, dans sa détresse, souhaita revoir cet homme et lui parler ; ce fut un désir brusque, instinetif, auquel elle ne résista point.

N’osant cependant revenir franchement sur ses pas, elle fit un détour et, quelques minutes plus tard, elle se trouva bien devant ceux qu’elle cherchait. Ils s’arrêtèrent, un peu surpris. L’homme donna le