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LES GARDIENNES

qu’à toucher presque les genoux de la religieuse.

— Dès que je l’ai vu, ma vie a changé… J’étais tremblante devant lui, mais si heureuse… et tout me semblait beau… Même absent et très loin de moi, il était ma compagnie ; je n’étais plus seule, ma sœur… Alors, au mois de mai dernier, il a obtenu une permission…

Sa voix soudain se cassa ; de longs sanglots la secouèrent. Elle haletait. La religieuse la regardait de ses yeux d’enfant, étonnés et pitoyables.

— Il ne faut pas pleurer ainsi, dit-elle ; voyons, ne pleurez plus !

Francine eut une sorte de long cri sourd.

— Ah ! ma sœur ! c’est qu’il m’a abandonnée !… Il m’a abandonnée et je vais étre mère !

La religieuse s’était levée. Elle mit sa main sur l’épaule de Francine et la redressa. Elle avait très mal entendu les paroles lamentables, mais le ton de désespoir l’avait bouleversée. Tout de suite, elle offrit encore son remède.

— Il faut vous repentir… je prierai pour vous… Je prierai…

Francine, maintenant, sanglotait à petit bruit. Sœur Angélique, de ses doigts blancs et secs, toucha légèrement le visage éploré et elle reprit :

— Allons, séchez bien vite ces larmes ! Consolez-vous. Notre-Seigneur est miséricordieux.

Elle disait cela, non point très gravement, mais de sa petite voix grêle, un peu puérile, comme une chose ordinaire et tout à fait sûre.

Francine en éprouva du soulagement et respira