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LES GARDIENNES

toujours à son approche, se sentit désireux de déguerpir mais elle le bioqua dans une encoignure et le pressa de questions — sans nul détour, car, avec cet innocent, il fallait parler bien clair.

Il répondit en tremblant, comme s’il eût été lui-même grand coupable ; il se défendit, disant qu’il n’y était pour rien, que ce n’était pas sa faute, que jamais il ne faisait de mal à personne. Elle n’en put rien tirer d’abord, que ces bredouillements apeurés. Quand il fut rassuré, il ne parla plus, mais sa figure se plissa ; il répondit par sourires et clins d’yeux. Si la Misangère n’acquit point encore une certitude complète, du moins ses soupçons s’aggravèrent. Elle en fut presque malade.

Georges, pendant la seconde semaine de permission, vit encore Francine chaque jour, mais, pour la rencontrer en tête-à-tête, il eut besoin de ruse. Plusieurs fois la Misangère faillit les surprendre.

Cette surveillance énervait le garçon ; et l’insistance avec laquelle sa mère lui parlait de Marguerite Ravisé le gênait aussi.

Il marquait son indépendance avec un peu d’humeur, quittait Château-Gallé tous les soirs, après souper, sans donner beaucoup d’explications. Il eut, avec des Américains, de mauvaises rencontres, faillit se colleter pour une raison très futile avec deux d’entre eux qui, au Paridier, avaient adressé à Francine un salut familier. À celle-ci, il fit de grande reproches, des reproches si injustes qu’elle ne trouva rien à répondre.

Il devait repartir le dimanche soir et passer la