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LES GARDIENNES

content, tout au fond de soi, parce que l’attitude de Francine le débarrassait à peu près d’un doute. Il pensa :

— Tout à l’heure je parlerai comme il convient et, d’un baiser, je saurai bien la consoler.

Mais, quand ils arrivèrent au bout du sillon, Christophe était en vue. Georges dit donc simplement, sans oser faire un geste ni même s’approcher d’elle :

— Je vous demande pardon, Francine ! c’est ma grande amitié qui me rend soupçonneux.

Elle lui sourit à travers ses larmes et aucun nuage ne passa plus entre eux.

Toute la soirée, ils travaillèrent côte à côte, échangeant des paroles banales, à cause de Christophe ; des paroles banales qui éveillaient cependant en leur cœur des frémissements infinis comme la plus belle musique.

Francine était dans le ravissement et Georges à peu près aussi fou.

Ils se trouvèrent seuls, au crépuscule, dans la grange du Paridier ; alors, sans rien se dire, ils marchèrent l’un vers l’autre pour un grand baiser tremblant, leur premier baiser d’amour, à tous les deux.

Ils se virent tous les jours de la semaine, à peu près librement. La Misangère, ne pouvant guère quitter son malade, se reposait un peu sur Georges du soin de veiller sur toutes choses à la ferme et à la Cabane. D’autre part, Maxime ne talonnait plus son oncle aux heures de loisir ; les Américains, en effet, l’occupaient grandement ; il commençait à