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LES GARDIENNES

Français et dont l’aide puissante allait peut-être, enfin, amener la victoire.

La Misangère elle-même leur ouvrait sa maison de Château-Gallé. Elle faisait volontiers commerce avec eux, leur vendant ses denrées au juste prix et même avec un léger rabais, car elle blâmait avec âpreté les gens sans conscience qui abusaient de l’insouciance de cette jeunesse.

La présence des soldats autour de la Cabane ne l’inquiétait nullement et elle avait aussi une confiance entière en la prudence de Marguerite Ravisé, Au contraire, elle n’aimait pas voir les Américains au Paridier ; là, elle les glaçait par son accueil et ils ne demeuraient pas longtemps en sa présence.

Elle montait autour de Solange une garde sévère, ne passait plus une seule journée sans venir plusieurs fois à la ferme, s’y présentant même très tard, à veillée faite.

Malgré tout cela, les soldats connaissaient le chemin du Paridier ; un d’entre eux surtout, un gradé chargé des achats et qui parlait aisément le français. Pour ce bel homme à taille flexible, Solange soignait son teint blanc et tourmentait ses cheveux : ses yeux noirs glissaient à propos, brillants et doux comme du velours.

Francine gênait et n’en pouvait douter. Si Solange eût osé entrer en lutte avec sa mère, la servante n’eût point traîné au Paridier.

Comme les autres, Francine avait vu les Américains tourner autour d’elle ; elle avait entendu quelques propos directs, non sans sourire à cause