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LES GARDIENNES

endroits et donnait même parfois de fameux conseils. Il rapportait à Maxime, en les embellissant, des aventures anciennes, les parties enragées où il avait tenu grande place autrefois, en compagnie de gaillards qui étaient vieux à présent et sans indulgence pour les écarts de la jeunesse.

Ce dernier point donnait force à Maxime. Cependant, l’enfant trouvait lui-même que le grand-père allait un peu loin ; n’étant pas sot, il songeait comme tout le monde que le pauvre homme perdait la tête.

Le père Claude perdait la tête… Immédiatement après sa chute, on s’était aperçu du changement de ses idées. Quelques semaines plus tard, il avait ressenti un malaise assez semblable à une première attaque de paralysie et, depuis, la déchéance s’aggravait de jour en jour, de façon sensible.

La Misangère le soignait avec dévouement. Chaque nuit, elle se levait plusieurs fois, alors même qu’il ne se plaignait point. Elle acceptait sans sourciller les pires injures et répondait d’une voix patiente que peu de gens lui connaissaient. Elle préparait de bons repas auxquels le bonhomme faisait grand honneur ; lui, si sobre jadis, mangeait maintenant sans retenue et il fallait le rationner. Il engraissait… Elle, au contraire, flottait en ses habits.

Aux heures de mauvais temps où l’on ne pouvait sortir, elle lui tenait volontiers compagnie, s’ingéniait à le soulager quand il souffrait ou bien à le distraire.

Mais à la moindre embellie, la Misangère se con-