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LES GARDIENNES

Solange, celle-ci fit de hautes manières. Elle dit, d’un air pincé :

— Je ne te permets pas de te mettre en dépense pour moi. J’accepte, mais je te dédommagerai d’une autre façon.

Francine, ramenée par ces propos à son humilité ordinaire, ne protesta point. Le lendemain matin, elle prit ses précautions pour remettre à Maxime les hameçons et la ficelle et lui fit promettre le secret.

Quant à Marguerite, elle attendrait sa broche car il fallait une occasion pour aller à la boulangerie. Cette occasion ne se présenta que le dimanche suivant ; toute la semaine, en effet, Francine dut travailler ferme afin de rattraper la journée perdue.

Le dimanche donc, dans l’après-midi, Francine monta à la boulangerie. Depuis un mois elle n’y était pas venue ; elle remarqua tout de suite un désordre inaccoutumé. Dans la cuisine elle vit d’abord Lucien qui installait une marmite devant le feu. Marguerite, la tête basse, était assise dans un coin ; entendant la porte s’ouvrir, elle se retourna, puis se leva promptement, montrant une émotion surprenante.

— C’est moi ! dit Francine, es-tu done malade, Marguerite ?

Ce fut Lucien qui répondit :

— Elle n’est pas malade, dit-il, mais paresseuse.

Sa voix sonnait avec âpreté ; en sa figure allongée d’adolescent, les yeux brillaient, ardents.

Il parla encore, refit le discours qu’il avait sans doute tenu devant sa sœur, l’instant d’auparavant :

— Malade ! Elle l’est peut-être moins que moi !