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LES GARDIENNES

Elle ajouta, pour elle seule :

— Mais je pense bien qu’il sera content… Il ne m’en voudra pas, s’il est juste, de lui avoir gardé sa ferme en état et d’avoir mis à portée de sa main un outil de beau travail.

Dès la semaine suivante, on essaya la lieuse dans les orges. Il y eût des tâtonnements le premier jour. Sur un papier laissé par le marchand, il y avait certain renseignement que l’on comprenait mal. Le père Claude donnait son avis et la Misangère voyait les choses d’une autre façon. Il fallait pourtant se décider. Le père Claude monta donc sur le siège, et cahin caha, l’attelage fit le tour du champ ; la Misangère suivait, attentive, prête à intervenir. Par chance, la machine se trouva bien réglée et le bonhomme lui-même ne fut pas trop mécontent de la besogne. À midi, il grommelait encore contre Hortense et sa damnée machine, mais c’était faux jeu et pour ne pas se rendre du premier coup. Toute la soirée, il se tint droit sur le siège comme un gars bachelier.

Le lendemain matin, il ne pouvait plus bouger, cassé en deux par un atroce mal de dos…

Il fallut mettre quelqu’un à sa place sur la lieuse. Cette place ne devait pas être si mauvaise, puisque, sur le prospectus laissé par le marchand, on la voyait occupée par une fillette endimanchée qui conduisait son attelage en riant aux anges du bon Dieu ! Cependant, on ne pouvait songer à Christophe, niais et maladroit, capable de tout casser, encore moins à Solange qui se plaignait du ventre,