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LES GARDIENNES

Et elle continua son chemin en rougissant, sans écouter l’autre qui disait encore de sa voix naïve :

— Francine, es-tu donc fâchée ? Moi, je ne t’ai rien fait !…

Dans la ruelle qui menait au canal, elle ralentit un peu sa marche et regarda sa lettre ; elle l’avait si bien froissée que les jambages de son nom avaient l’air de danser sur l’enveloppe. Elle l’étira, l’aplatit entre ses paumes, puis, furtivement, la glissa dans son corsage.

Elle arriva à la Cabane les yeux ensoleillés.

La Misangère était là, l’air grave ; devant elle, Léa tout en pleurs et, dans un coin, Maxime, cachant son Visage. Francine s’arrêta court : en vérité elle ne pouvait tomber plus mal !

Le garde de Saint-Jean-du-Marais avait, le matin même, fait le voyage de Sérigny pour venir se plaindre de Maxime.

La veille, l’enfant était parti sur son bateau, au petit jour, pour aller lever ses engins ou ceux des autres, comme à l’habitude ; mais, cette fois, il n’était rentré qu’à la nuit noire. Ayant fait la rencontre d’un garnement de son espèce, il s’était enfoncé avec le camarade en plein Marais ; en passant, on avait tiré le Grenouillaud de sa hutte pour l’entraîner en escapade du côté de Saint-Jean. Or, des diableries avaient été un peu fortes : les trois compères avaient maraudé et, pour comble, le feu qu’ils avaient allumé pour leur déjeuner s’était communiqué à un tas de fagots. On ne les accusait pas d’avoir souhaité cet incendie, mais enfin les