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LES GARDIENNES

— Après tout ! après tout !

Cela ramena son esprit vers ses préoccupations actuelles : revint aussi son petit sourire mélancolique. Elle acheva ainsi la phrase commencée :

— Après tout… s’il m’avait écrit comme aux autres, il me serait bien égal d’être moins riche. La fortune ne fait pas le bonheur.

Elle se leva, secoua son tablier, sur lequel, tout en songeant, elle avait égrené des herbes mûres. Puis elle se dirigea vers la Cabane pour y préparer le repas du soir.

Des pêcheurs commençaient à démonter leurs lignes ; quelques-uns venaient du Marais et leurs bateaux glissaient sur l’eau brillante. Sur l’un de ces bateaux, un soldat permissionnaire pagayait lentement pour sortir d’un fossé ; quand il eut débouché en eau profonde, il posa sa rame et se laissa flotter. Francine, malgré elle, s’arrêta pour le regarder ; il lui sembla qu’une voix très douce murmurait à son oreille :

— Vous ne savez pas, Francine, combien il est plaisant de voyager ainsi… On se croirait parti en songe.

Elle continua son chemin, arriva à la Cabane. Il était encore un peu tôt pour s’occuper du dîner ; elle s’approcha donc de l’eau, mit le pied sur un bateau et choisit pour s’asseoir la place qu’occupait Georges, la veille de son départ, quand il avait si doucement parlé.

Elle n’y fut pas plutôt installée que Maxime s’approcha en tapinois et lança un pavé dans le