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LES GARDIENNES

Eh oui ! elle saurait bien s’y prendre et ne serait pas tant à plaindre ! On lui remettrait de l’argent, lors de sa majorité, beaucoup d’argent. Elle se donna la tâche de compter ; c’était une occupation réconfortante, Sa fortune, l’année précédente, montait à trois mille francs environ ; avec les hauts gages que l’on payait pour elle chez le percepteur, cela ferait plus de quatre mille peut-être. Et il y avait encore son trousseau, un trousseau modeste, mais qui valait bien, cependant, celui de beaucoup de servantes.

Quatre mille francs à vingt et un ans ; quatre mille francs dont elle ferait un placement sûr suivant les conseils qu’elle demanderait aux bureaux de l’Assistance. Et elle continuerait à gagner beaucoup, saurait discuter les conditions de son travail ; les patronnes qui voudraient l’avoir à leur service devraient y mettre le prix… Ah ! mais, bien sûr !

Ainsi, elle arriverait vite à posséder un pécule qui lui procurerait l’indépendance. Il lui serait peut-être possible de se retirer rentière avant d’avoir atteint un grand âge ; ou bien, plutôt, elle prendrait à son compte un petit fonds de commerce qu’elle ne serait pas en peine de diriger seule.

Seule !… Pourquoi seule ?… Est-ce qu’on pouvait savoir, après tout ? Une fille honnète et travailleuse qui trouve un bon mari, ce n’est pas miracle !… Avec tout l’argent qu’elle aurait !

Celles qui venaient de passer tout à l’heure, la regardant de haut, n’en apporteraient peut-être pas autant, le jour de leurs noces.

Elle se prit à répéter tout haut :