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LES GARDIENNES

fiter de ton dimanche pour t’amuser comme font toutes les servantes ?

L’autre balbutia :

— Mon amusement, je le prends ici. Où irais-je ? je ne connais personne…

— Eh bien ! reprit la Misangère, il faut faire connaissance ! Sors te promener, ma fille !

Ce n’étaient point là de douces paroles d’invitation, mais un congé très ferme. Comme Francine demeurait immobile, interdite, la Misangère répéta :

— Sors à la promenade car il fait beau temps… J’aiderai Marguerite à ta place… D’ailleurs, j’ai à lui parler.

Francine abandonna sa besogne et s’en alla par les rues du village somnolent.

Elle remonta vers le Paridier, alla s’asseoir au détour du pré Buffier, à cet endroit où, pour la première fois, elle avait rencontré Georges Misanger.

Passèrent trois filles de Sérigny, accompagnées de tout jeunes garçons très insolents. Les garçons dévisagèrent Francine, puis lui adressèrent quelques paroles sottes et lourdes. Les filles plus hautaines, sachant garder leur rang, ne lui parlèrent point et elles entraînèrent leurs compagnons vers la plaine. La bande disparut au détour. Francine resta seule, au cœur de cette journée silencieuse…

Ce Georges !… Il avait écrit à ses parents, à sa sœur ; il avait envoyé une carte à Maxime, une autre, dernièrement, à Marguerite Ravisé. Il avait pensé à tout le monde, du moins à tous ceux qu’il aimait…