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— T’as le fricot, Pâtureau ! T’as le fricot, mon valet ! oui, dame ! t’as le fricot !

La Pitaude dut le bousculer ; puis elle sortit à son tour.

Le refrain de la noce s’éloigna ; les noceurs arrivèrent aux Grandes-Pelleteries ; ils ululèrent.

Alors, pendant que Séverin sautait à terre pour mettre le verrou, Delphine, vite, acheva de se dévêtir.

Séverin, en se réveillant, vers deux heures, voit que la lune est levée. Il a encore les oreilles pleines de bruit ; la nuit cependant est toute tranquille et blanche ; seul dans les jardins un rossignol chante.

Des rayons entrés par les quatre carreaux de la fenêtre se sont posés sur le lit et le buffet ; ils dorment là, petites choses légères, impossibles et charmantes, que l’on dérangerait avec des doigts de rêve.

Et voici que Séverin revoit, très loin en arrière, une maison toute pareille à celle-ci : des poutrelles fumées et fléchissantes, un lit, un buffet avec son vaisselier, une table qui boite à cause de la terre inégale… oui, pareille, bien pareille ! Là, dans le coin de la cheminée, sur la pierre fendue, une vieille aux yeux blancs qui crachote dans la cendre, puis une autre femme voûtée avec des lèvres pâles, puis des petits qui pleurent et qui se traînent à peine vêtus… Quelle vision ! les genoux transis, la huche vide, la faim, le froid, la toux, la mort qui passe… Ce n’est pas un cauchemar, c’est un souvenir.