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scendu dans l’échelle pour agripper son sac à col tordu, elle lui marcha sur les doigts. Alors il empoigna la jambe qui se démenait, et ses doigts glissèrent entre les genoux jusqu’à la peau tiède. Puis il s’enfuit, le sang aux tempes, pendant que Marichette, point fâchée, secouait ses jupes comme pour en faire tomber un rat.

Séverin, les jours suivants, songea plus d’une fois à Marichette ; et quand il revint aux Pelleteries, il se sentit tout à la fois heureux et tremblant en apercevant la mère Larin dans son carré de choux, au bout du jardin. Comme il le prévoyait, ce fut encore la servante qui vint l’aider à mesurer le grain.

Le travail fait, ils causèrent. Elle plaisantait librement ; accroupie près du tas pendant qu’il liait le sac, elle plongeait dans le froment ses bras rouges qui devenaient très blancs au-dessus du coude, et elle riait de son rire encourageant de bonne fille. Il perdit la tête ; il se baissa sans une parole ; il la renversa d’un geste hardi et sa bouche écrasa les belles lèvres de chair rouge gourmandes d’amour. Elle, souriante, s’abandonnait, glissait, la poitrine soulevée. Mais un bruit soudain les mit debout : le sac étroit et mal lié venait de tomber, le blé croulait sur leurs jambes. La vieille Larin revenait de l’ouche ; il fallut vite réparer le dommage…

En arrivant, le soir, à la Petite-Rue, Séverin trouva Delphine dans la cour, au bord de l’écluse. Elle jetait devant elle, à l’endroit où les petits vairons tourbillonnent dans l’eau mince, des croûtes moisies et des pommes de terre écrasées.