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avaient grelotté aux mêmes portes et, comme elle était plus jeune que lui, il avait dû maintes fois la pousser au derrière afin qu’elle pût passer les échaliers. Devenue grande, son nom était sur les lèvres des gens, car elle était aguichante et provoquait les gars.

Marichette reconnut Séverin dès qu’elle l’aperçut dans la cour, et elle montra une joie bruyante. Elle était drue et saine et, malgré son front bas, jolie avec ses yeux hardis et ses lèvres riches.

— Tu viens pour la pochée, maintenant ! dit-elle ; le métier ne plaît donc plus à Guste ?

— Non, répondit-il ; on raconte que tu l’as battu un jour qu’il voulait t’emporter au moulin dans son sac ; est-ce vrai ?

— C’est vrai ; bien sûr ! Je ne suis pas une fille qu’on emporte, moi ; essaye, tu verras !

Elle ajouta se parlant à elle-même :

— Peuh ! un mioche !

— Qui, un mioche ?

Mais déjà, précédant Séverin, elle était au grenier, cherchant un sac qu’elle apporta et déplia avec de jolis rires inutiles.

Grande, elle maintenait haut l’ouverture pour fatiguer le jeune homme, et elle lui secouait sous le nez la toile enfarinée. Quand le sac fut plein, elle le souleva et le porta elle-même au bord de l’échelle. Séverin s’extasia sur sa force ; il s’offrit pour épousseter son corsage où de la farine s’était déposée, mais elle lui rabattit le poignet et le lui tordit en manière de jeu, car elle était forte comme un homme et gaie comme une taure bien nourrie. Puis, quand Séverin fut des-