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de mener la maison et bien plus capable encore de faire tourner la tête aux gars du pays.

Auguste, le frère, était au bourg de Coutigny ; il arriva quelques minutes après. Lui aussi avait beaucoup forci. Il était content de revoir Séverin, oui, bien content. Il expliqua pourquoi. Il s’était querellé un jour avec le valet, un fainéant, disait-il, et le père, donnant raison à son fils, avait congédié l’autre. Mais, depuis, il avait fallu trimer pour deux.

— Maintenant que te voilà, ajouta-t-il, nous aurons de l’aise. Tu iras à la pochée pendant que je ferai la terre.

— Ça sera dur, dit Bernou, ça sera dur pour tes mains de bourgeois, maintenant qu’il va falloir travailler.

Séverin, distrait par la petite qui taillait pour la soupe de minces lamelles dans le chanteau de pain gris, répondit négligemment :

— Oui, va falloir travailler… mais je n’ai pas peur !

En mangeant, ils parlèrent des choses qui s’étaient passées au moulin durant ces quatre ans. Cela marchait doucement, tout doucement ; on louait trop cher ; le propriétaire, avocat à Poitiers, n’était pas mauvais, mais on avait affaire à un régisseur insolent et tracassier qui s’enrichissait pendant que les locataires faisaient des dettes ; l’eau avait manqué pendant deux étés et le moulin avait perdu des pratiques.

— Tu vois, disait Bernou, passé ces deux mois où l’ouvrage presse, nous ne pourrons pas te garder ; tu serais trop fort de prix pour nous. Nous nous enten-