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auxquelles on s’attarde rarement dans les familles nombreuses et pauvres où l’on est pressé ; mais depuis qu’elle allait tout à fait mal, elle était devenue encore bien plus caressane.

— As-tu été plus forte aujourd’hui ? demanda Séverin ; as-tu mangé ? Vois donc ce que je t’apporte. Il sortit la poule de dessous sa blouse et la mit sur le lit. Un sourire éclaira le visage blanc de la malade.

— Ah ! c’est ma poule ! tu as pensé à moi, merci, père. Comme elle est lourde ! je ne peux pas la soulever ! quelles belles plumes ! grand’mère, viens voir !

La Bernoude se leva et vint près du lit.

— Où l’as-tu prise, mon gars ? demanda-t-elle à Séverin ; chez Guste ?

— Non, pas chez Guste.

— Tu ne l’as pas prise aux Arrolettes ?

— Si, je l’ai prise aux Arrolettes.

La vieille ayant soulevé la bête s’exclama à son tour

— Eh bien ! je pense qu’elle est lourde ! Elle tâta sous la plume et s’approcha de la lumière pour mieux voir.

— Mais ! fit-elle tout à coup, ce n’est pas une poule ! cela m’étonnait bien ! c’est un coq…, ou plutôt… c’est un chapon.

Séverin s’avança vivement.

— Un chapon !

— Oui, un chapon ! regarde la crête coupée… où as-tu pris ça ? Dans le pays, il n’y a que la métayère de Malitrou qui chaponne, et encore elle porte ses chapons au maître, à M. Magnon… Où as-tu pris ça, mon bon gars ?