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village, deux mauvaises pièces d’une douzaine d’années ; elle savait plus de choses que sa sœur aînée et celle-ci eût prévenu le père si elle eût osé.

Quant aux bessons, ils devenaient plus raisonnables. Ils avaient mendié un bout de temps ; mais comme il n’y avait plus guère de cherche-pain dans la commune, Séverin avait eu honte et avait gardé ses enfants chez lui. Seulement la dette s’était accrue chez le boulanger.

Séverin se disait :

— Voilà mes bessons qui sont bientôt en force de travailler ; dans deux ans je les gagerai ; cela fera cinquante écus de plus et deux bouches de moins à nourrir ; nous serons sauvés.

En attendant la maison était vide ; pas de meubles, pas de hardes. Malgré toute son application, Bas-Bleu ne parvenait pas à remettre à neuf les nippes trop vieilles et l’on n’eût pas donné dix sous de la défroque des petits.

Mais ce qui inquiétait surtout Séverin, c’était la santé de Bas-Bleu. Elle toussait depuis longtemps ; très grande pour son âge, elle avait les épaules étroites et pointues ; sous sa peau trop claire, on voyait courir les veines bleues. Chaque automne elle avait un gros rhume qui lui donnait la fièvre.

Le médecin, consulté deux fois, avait dit qu’il fallait du repos, une habitation sèche et claire et surtout une nourriture fortifiante. C’étaient là des paroles inutiles. Séverin chercha ailleurs : il espérait trouver un remède qui guérirait sa fille d’un coup. Un jour, la Gustine le réconforta.