Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/206

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHAPITRE II

LES CHERCHE-PAIN


Louise mendiait franchement ; malgré l’aide des voisins, il avait bien fallu en venir là.

Les bessons étant encore un peu jeunes, la fillette, seule, faisait des tournées. Il lui arrivait de passer deux fois par semaine au seuil des métairies. Les gens s’habituaient à elle, à son petit air de femme sérieuse, à ses joues maigres, à ses yeux sombres, des yeux trop grands qui lui mangeaient la figure. Comme elle allait toujours pieds nus et que le froid lui marbrait les chevilles, quelqu’un lui avait donné le nom de Bas-Bleu et ce nom lui était resté. Les servantes disaient :

— Patronne ! Bas-Bleu des Pelleteries est à la porte ; faut-il qu’on donne ?

Et de même, les vieux brèche-dents, diseurs de rigourdaines, criaient derrière elle pour la faire se retourner :

— Bas-Bleu ! Bas-Bleu ! tu perds tes jarretières.

Ils diraient cela, ces anciens, sans méchanceté aucune, étant désireux de la faire rire.

Pourtant, cela ne plaisait pas à Séverin ; c’est qu’aussi il était plus fier qu’il n’est séant à un malheureux. À