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CHAPITRE IV

QUATRE ET CINQ


Les valets travaillent aux champs ; ils songent aux bêtes, aux outils, aux fourrages, aux labours ; parfois ils chantent. Ils tapent dur, l’hiver quand les mains saignent, l’été quand la peau cuit ; mais la besogne faite, ils mangent ; ils mangent non pas bien, certes, mais assez ; on ne leur plaint ni légumes ni pain.

Les femmes qui restent à la maison ont tous les cassements de tête : à elles les enfants, à elles les guenilles, à elles les petites dettes, à elles l’inquiétude toujours présente du lendemain ; à elles surtout les quignons durs, grignotés sans beurre ni lard.

Maisons creuses, nettes de pain, pleines d’enfants ; maisons creuses, huches vides, bourses vides ! Qu’on s’arrange !

La vraie misère commença pour Delphine dés la naissance des bessons.

Bien qu’elle fût forte, en dépit de son air de petite femme délicate, elle ne put allaiter les deux enfants. Alors, elle imagina de leur donner à téter à tour de rôle et de leur faire, en plus, de la soupe et des bouillies de pommes de terre. Séverin, qui se souvenait de Désiré, s’y opposa ; il ne voulut pas entendre parler de