Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/108

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fallait même se hâter, car le temps n’était pas sûr.

Delphine, le premier jour, apporta sa petite aux Marandières et donna un coup de main pour le râtelage ; mais le lendemain, l’enfant étant indisposée, elle resta chez elle. La Loriote sut bien faire entendre qu’elle tenait Delphine pour une paresseuse et qu’il faut avoir un peu plus de courage quand on n’a pas trop de pain chez soi. Séverin se contint.

Toute la matinée il fit des charretées pendant que Frédéric et le petit valet approchaient le foin. Après midi, ce fut le tour de Frédéric de monter sur la charrette. Tout alla bien d’abord, mais Loriot ayant, malgré sa femme, apporté une pichetée de vin pour donner du courage aux travailleurs, le gars excité prétendit que les deux chargeurs n’en finissaient pas.

— Hardi, donc ! il en faudrait quatre comme vous pour m’apporter le foin ! Hardi ! Apportez ! Les deux autres apportèrent ; le foin monta vite dans la charrette ; Frédéric, enfoncé jusqu’aux aisselles, fut un moment débordé ; il s’impatienta encore :

— Bon Diou ! Quand saurez-vous charger ? Hein ! Vous devriez faire de plus grosses fourchées ! Puis, brusquement, comme Séverin, sans s’émouvoir, continuait à piquer dans une petite meule, il lâcha l’injure des rudes gars aux faillis mâles :

— Entends-tu pas ? C’est pour toi que je parle, femme de ville !

Le valet se retourna tout pâle.

— Fédéri Loriot, si tu n’es pas content de mon travail, faut le dire ! Je fais ce que je peux, si tu n’es pas content, dis-le tout de suite.