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récoltes, on ne consultait plus guère Loriot. Bousculé par les siens, il était naturellement enclin à soutenir le valet ; il reconnaissait d’ailleurs que Séverin était dur à l’ouvrage et ne rechignait pas devant la soupe à l’eau et au sel. Mais il ne sonnait mot devant les autres, filant doux pour faire oublier ses soûleries.

Le second valet était un petit gars sournois de dix-sept ans ; il aurait volontiers fait longue mérienne quand les patrons étaient absents. Séverin ne comprenant pas les choses de cette façon, le menait rondement ; l’autre lui en gardait rancune et faisait des contes à Frédéric sur des propos qu’il prêtait, au grand valet. Parfois, à l’ouvrage, il y avait, entre le gars et le petit compagnon, des rires qui ne s’expliquaient guère ; parfois aussi Séverin surprenait des coups d’œil d’intelligence et des gestes de moquerie. Il ne disait rien, tapait droit devant lui.

Pourtant les choses se gâtèrent ; il eut, à plusieurs reprises, des mots avec Frédéric, une fois pour des fagots soi-disant mal faits, une autre fois à cause d’une journée dont il avait besoin pour bêcher son jardin et que le gars s’entêtait à refuser, bien qu’elle eût été prévue dans le marché.

Enfin la haine qui était entre eux éclata au temps des fauches.

L’herbe du dernier pré était à terre ; Séverin, fin faucheur, avait tout le temps poussé l’autre devant lui, et Frédéric sentait d’autant plus l’humiliation que, le soir, après la soupe, le petit valet mettait des vantardises au compte de Séverin. L’herbe donc était toute à terre et il fallait commencer à la rentrer ; il