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Aussi bien tout le monde en parle.

J’ai fait aujourd’hui plusieurs visites. J’ai vu Mme Michaud, Mme Évrard ; j’ai vu Bijard, j’ai vu Marceline. Partout l’on m’a dit :

— Vous savez que l’institutrice adjointe de Trevins a épousé M. Olivet ? Que pensez-vous de ce mariage ?

Ce que j’en pense ? Je voudrais, ma foi, bien le savoir au juste.

Mme Michaud a été réservée dans ses appréciations. J’ai deviné qu’elle avait beaucoup de choses à dire mais qu’elle attendait une meilleure occasion.

Elle n’a pour moi qu’une estime médiocre et M. Olivet est riche : deux raisons pour se taire.

Mme Évrard a été, au contraire, prolixe. Il doit y avoir là-dessous une sourde jalousie. Mon ami, qui était dans ses bonnes, a tiré la chose au clair.

— C’est injuste, a-t-il dit, avec cet accent inimitable qui rend sa pensée intime si difficile à deviner, c’est injuste, c’est paradoxal, c’est le monde renversé. Aujourd’hui un instituteur ne prendra jamais qu’une fille sans le sou ; au contraire une institutrice, si elle est adroite, peut lever un client très sérieux. Les veuves surtout s’entendent à cela ; d’ailleurs les veuves sont toujours fortes, très fortes… Bien que tu ne sois pas institutrice, ma chérie, jolie comme tu es, si je consens à mourir cette année, je te prédis un vieux notaire pour la