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Mon beau-frère me l’a assez répété :

— Tu es fier ; tu ne vaux pas mieux que les autres.

Pourtant je ne suis qu’un quart d’intellectuel.

Et puis mon travail est varié… j’accomplis, dix mois de l’année, une besogne à moitié machinale, je vaque chez moi à mes occupations de ménagère et pendant les vacances, je joue du muscle comme un portefaix.

J’ai travaillé cette année encore aux Écotières ; oh ! en toute liberté. J’aurais pu croiser les bras et faire la sieste pendant que mon beau-frère et sa famille trimaient au soleil ; mais c’est là une insolence dont je ne suis pas capable et je reviens avec des mains calleuses.

Je suis donc mieux placé que personne pour apprécier toutes sortes de travaux, pour célébrer la beauté, la noblesse, la grandeur des différentes besognes humaines.

Hé ! Hé ! Il convient de parler avec gravité sur ce sujet ; il n’y a pas de termes trop somptueux pour de telles phrases. Je suis beau, noble et grand de bien des manières et les autres aussi sont admirables…

C’est là une de ces bonnes blagues utiles par quoi les pauvres hommes se consolent.

Et notre vanité est telle qu’elle vainc notre souffrance.

Sans cela nous ne vivrions pas.