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LE CHEMIN DE PLAINE


25 avril 1902. — C’est donc une affaire décidée. Ce gros cahier de beau papier anglais, le seul luxe que je me sois permis, se couvrira peu à peu de cette magnifique écriture de maître d’école qui est le seul produit luxueux de mon éducation.

Cela, par instants, me semble une absurde gageure.

Je compte, en effet, parmi les mauvais moments de mon existence, les heures passées devant mon pupitre d’École normale, en tête à tête avec une grande feuille bête qu’il me fallait remplir coûte que coûte.

Oh ! la désolante immensité de ce format écolier ! Oh ! ces sujets de dissertations ! ces proverbes ! les uns sans anse, sans manche, sans poignée, carrés comme des briques ; les autres d’apparence plus aimable, mais hérissés de pointes sournoises comme des colliers de bouledogues ! Oh ! ces poids de fonte et ces têtes de chardons avec lesquels il fallait indifféremment jongler ! Oh ! ces pensées ténébreuses qu’il fallait emmener avec soi et éclairer durant quatre pages, quatre lieues !