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marchands de vins en gros, redevenez ce que vous fûtes. Naguère, vous me faisiez copieusement goûter votre blanc d’Anjou, votre bleu du Médoc ; maintenant, vous m’offrez à peine une cigarette de tabac de cantine et, quand je refuse, vous dites :

— C’est moi qui vous remercie.

Naguère, votre dame — qui me jugeait à la fois sot et « comme il faut » — me présentait à des duègnes considérables. Elle montrait le professeur de son fils à mame Godard, à mame Blancé et aussi à la dame du notaire… Or, hier, il est venu pendant ma leçon une jeune fille rieuse ; il est venu une jouvencelle au rire si joli que je n’en ai jamais entendu de pareil, et je n’ai point été présenté.

Jovial monsieur Bérion, glorieuse madame Bérion, redevenez ce que vous fûtes ! ne me fermez point votre maison et payez ! payez !

Le plus fort c’est que ma réputation a fait tache d’huile. Pour mes collègues voisins, il est bien évident que « je ne sais pas vivre ». Cependant il y a une variante. Pour eux, pour Mme Valine en particulier que je vois très souvent par ici, je suis brutal, grossier, insolent… non, ce n’est pas tout à fait cela… je suis cynique ; et c’est une attitude que je prends. Mme Valine ne m’en estime pas moins ; au contraire. Je suis un original ; je suis le petit Diogène de Lurgé.

Madame Valine, vous exagérez. J’habite une