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Mais la voilà qui m’invite à aller les voir souvent. Elle s’excuse encore de l’embarras qu’elle me cause. Maurice aurait bien pu aller chercher ce colis ; ce soir, il est sorti ; il brouette du linge quelque part, car c’est jour de lessive. Elle est seule à la maison. Compris !

Nous arrivons ; sur le seuil je m’arrête et je lâche la maudite ficelle.

— Je vous remercie beaucoup, monsieur. Me ferez-vous le plaisir d’entrer ?

— Ça, non ! Bonsoir, madame !

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Je n’ai pas eu une seconde d’hésitation.

Il faut que je me rende tout bas cette justice : je suis incapable de trahir un camarade.

Je suis menteur autant que l’honnête homme moyen. J’ai trompé bien des gens avec une assez grande aisance. J’ai trompé, je crois, toutes les amies ou maîtresses que j’ai eues ; cela ne m’a jamais laissé de remords très cuisants et, si je me mariais, je tromperais peut-être bien ma femme… Mais je n’ai jamais été déloyal envers un camarade.

Coucher avec la femme de Maurice, voilà la plus détestable des perspectives. Je recule, je me cabre comme devant un inceste.

Ce n’est pas de la vertu ; la vertu n’a rien à voir en cette affaire. C’est de l’impuissance. Je ne m’en vante pas.