Page:Pérochon-Le Chemin de plaine.djvu/46

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


— Maurice ! cria la voix sèche de la patronne, Maurice ! tu ne peux donc pas surveiller le petit ?… Cela m’étonnerait bien si tu t’en occupais un peu !

Il se leva violemment.

— Dire, nom de D…, que je n’aurai pas la veine d’être cocu !

10 juin. — Ne l’est-il point ?

— Cinq heures et demie. Je flâne vers la gare. Un train doit s’arrêter ; le voici ; je passe sur le quai. Pas de voyageurs ; je suis seul avec les employés. J’appréhende devant le wagon de tête les quolibets d’une douzaine d’artilleurs. Je vais en queue. Deux poupées décolletées regardent par la portière d’un compartiment de seconde. On sait pourquoi les demoiselles en voyage regardent par la portière. Je désirerais être mieux vêtu. Je relève mes moustaches. Elles doivent au moins regarder mes moustaches…

Ce sont sans doute deux demi-bourgoises très réservées dans leur petite ville ; mais ici la certitude de n’être pas connues les libère de toute hypocrisie et elles piquent sur moi des regards aigus de courtisanes.

Les jolies filles ! Elles sont assez dévêtues pour que je puisse deviner des choses émouvantes ; et je m’émeus… je m’émeus…

Le train souffle, crache, lâche de l’eau, fait toutes